Comment défiler au temps du coronavirus

Nevine Ahmed Dimanche 04 Octobre 2020-12:03:05 Dossier
Comment défiler au temps du coronavirus
Comment défiler au temps du coronavirus

La Fashion week a démarré lundi dernier à Paris en pleine progression du Covid-19. Le prêt-à-porter sera « phygitale »... c'est-à-dire mi-physique, mi-digitale. A Londres, les défilés ont été faits à leurs dates initialement prévues, mais ils étaient « numériques ». Quant à la cité de la lumière, elle a renoué avec les défilés, laissant les interrogations ouvertes quant aux conséquences de cette étape, mais Paris ne peut jamais vivre sans la mode. Flashback et flashforward sur le monde de la mode. 

 

 

 

Le show a repris à Paris. Les grandes maisons comme Dior, Chanel ou Vuitton renouent avec les défilés pendant la Fashion week qui a démarré lundi dernier, en pleine progression du Covid-19, même si la plupart des marques ont choisi de présenter leur collection en ligne. En Février et mars cette année, les défilés avaient été impactés par le coronavirus. 

Le site « Le Matin.ch » souligne qu'après la mode homme et la haute couture entièrement virtuelles cet été pour la première fois de l’histoire, la semaine du prêt-à-porter féminin du 28 septembre au 6 octobre est « phygitale », mi-physique, mi-digitale, mais tout aussi atypique.

 

Sous réserve 

Saint Laurent a décidé pendant le confinement de renoncer aux Fashion weeks en annonçant que la maison va créer à son propre rythme. Celine par Hedi Slimane, et Off-white, la marque de l’Américain Virgil Abloh, star des millenials, sont aussi absents cette saison. Mais dix nouveaux créateurs entrent sur le calendrier officiel où figurent 84 maisons, plus que d’habitude. 

Défilés masqués avec très peu d’invités étrangers et « sous réserve » de l’évolution des consignes sanitaires, présentations sur invitation, vidéos diffusées sur les réseaux sociaux: les créateurs s’adaptent et tentent de s’approprier les nouveaux formats pour parler de la mode au temps de la pandémie. « Cette collection est le miroir des cinq derniers mois. Je travaille toujours comme ça, c’est le monde autour de nous qui a changé radicalement », a déclaré à l’AFP la jeune créatrice française Marine Serre.

 

La force du vêtement 

Après d’impressionnants défilés à l’esthétique post-apocalyptique, elle a opté cette fois pour un court-métrage qui sera diffusé mardi, dans lequel elle a voulu mettre en valeur « la force qu’a le vêtement aujourd’hui, comment il nous protège, nous aide à affronter notre quotidien et à avancer ». 

Fer de lance avec le Belge Dries Van Noten d’un manifeste pour une mode plus responsable soutenu par des centaines de petites maisons qui s’engagent à produire moins et à réinventer les défilés, elle dit qu’elle va « s’adapter en fonction de ce qui va se passer ».
« Je n’ai rien contre refaire un show dans les prochains mois. Ce qui est intéressant dans les Fashion weeks, c’est de créer une synergie, un moment de partage, être ensemble », souligne-t-elle. Mais avoir « 25 (défilés) par an n’a pas de sens ».

 

Interrogation existentielle 

Le Géorgien Demna Gvasalia, directeur artistique de Balenciaga a confié dans une interview au média spécialisé WWD s’être demandé « si la mode a un sens dans ce monde apocalyptique dans lequel on vit depuis mars ». Avant de retrouver le goût pour les vêtements. « J’ai découvert que même aux temps de la pandémie, les gens veulent des nouveautés, même plus, pour se distraire de ces horreurs », a souligné le créateur qui fera une présentation numérique le 4 octobre et un défilé haute couture en juillet.

 

Huit minutes

 

La Turque Ece Ege à la tête de sa marque Dice Kayek est de retour à Paris Fashion week avec un film, après y avoir renoncé pendant quatre ans car elle ne supportait plus le rythme qui exigeait jusqu’à six collections par an. « Les films ou les expositions permettent d’exprimer qu’il y a d’autres choses dans votre univers que les robes, quelque chose que vous voulez raconter à travers le vêtement. Un film est toujours là, contrairement au défilé où vous mettez votre vie, toute votre énergie, votre fortune pendant six mois et puis cela dure huit minutes et personne n’a rien compris », résume-t-elle à l’AFP.

 

Un défilé en ligne 

D'après le site « Euro accounting », le British Fashion Council avait annoncé au mois de juin, que le défilé de la fashion week à Londres aurait bien lieu aux dates initiales, mais il s'est fait entièrement en ligne. Une plateforme 100% numérique donc et qui a diffusé une fusion des défilés homme et femme. Une première dans le monde de la mode, qui essaye de s’adapter aux mesures de confinement. La plateforme London fashion week avait été ouverte aux professionnels comme au public. L’occasion de suivre les interviews, podcasts et autres showrooms numériques en direct depuis chez soi. 

La directrice générale du BFC, Caroline Rush a déclaré qu’en créant une plateforme culturelle pour la fashion week « nous adaptons l’innovation numérique et mettons en place quelque chose qui servira de vitrine mondiale pour l’avenir ». Un modèle déjà testé à Moscou et qui pourrait se répandre à Paris (avant que la capitale de la mode n'ait annoncé reprendre les défilés de mode) et New York, étapes importantes de la Fashion Week. 

L’idée était de permettre aux créateurs d’avoir la possibilité de vendre leurs collections au public même dans le contexte actuel. 

Le Covid-19 a-t-il changé le monde de la mode pour de bon ? 

L'écho se demande si la crise sanitaire a forcé le monde de la mode à revoir son rythme effréné. 

Giorgio Armani avait compris ce qu’il se passait avant même que le papier toilette ne devienne une marchandise rare dans les rayons. En février dernier, le créateur de mode italien a été le premier à annuler la présentation en public de sa collection automne « Pour le bien-être des invités ».  

Une première en 45 ans de défilés Armani. Le dernier dimanche de la Fashion Week de Milan, ses modèles ont défilé dans une pièce vide, face aux caméras. « La sécurité des autres est plus importante que votre propre succès ». « Même le crach financier de 2008 a eu moins d’impact. Aujourd’hui, tout le monde est concerné», déclare le créateur belge, Christian Wijnants, propriétaire de sa marque depuis 2003. « Jamais dans l’histoire de l’entreprise, nous n’avions vécu quelque chose d’aussi global et d’impactant que cette pandémie », résume, pour sa part, Bruno Pavlovsky, président de la maison Chanel, cité par l'écho. 

Créer au temps du coronavirus 


Ceux qui le pouvaient, ont transformé leurs lignes de production. À l’instar de la maison de couture Natan et du fabricant de lingerie Van de Velde en Belgique, Prada ou Louis Vuitton, par exemple, ont fabriqué sur leurs lignes de production des masques et des blouses pour le personnel des hôpitaux et les médecins.

 

Pour l’industrie de la mode, ce travail à domicile a été un moment de réflexion avant tout. Alessandro Michele, le directeur de la création de Gucci, a décidé que le rythme traditionnel de la mode était un « rituel laborieux » dont il devait se débarrasser. L’Italien a donc proposé une nouvelle approche: « Dorénavant, nous ne nous réunirons plus que deux fois par an ». Il présentera ses collections sans saison, à son propre rythme, à l’écart du calendrier de la mode à Milan. 

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